DROIT DE GREVE

 

- Le droit de grève

Longtemps refusé aux agents publics, le droit de grève leur a solennellement été reconnu par le préambule de la constitution de 1946.
Ce droit a été réaffirmé en 1958.
L'article 10 de la loi du 13 juillet 1983 en reprend la formulation en énonçant :
" Les fonctionnaires exercent le droit de grève dans le cadre des lois qui le réglementent ".

Le législateur n'est guère intervenu et, dans l'attente de cette réglementation, c'est la jurisprudence du Conseil d'Etat qui a été amenée à préciser le régime du droit de grève et à combler les lacunes du législateur.

- Conditions de l'exercice du droit de grève

Licite en son principe, la grève n'en est pas moins soumise à certaines conditions.

L'article L. 521-2 du Code du travail pose le principe du préavis pour les personnels de l'Etat, des Régions, des Départements et des Communes comptant plus de 10 000 habitants ainsi que pour les personnels des entreprises, des organismes et des établissements publics ou privés lorsque ceux-ci sont chargés de la gestion d'un service public.

Les associations catégorielles ne peuvent donner un ordre de cessation concertée du travail, n'étant pas visées par le décret 447 du 27 mai 1982, alors qu'une organisation syndicale représentative d'une catégorie professionnelle, qui rentre dans le champ d'application du présent article, est habilitée à le faire

L'article L. 521-3 du Code du travail précise que lorsque les personnels mentionnés à l'article L. 521-2 font usage du droit de grève, la cessation concertée du travail doit être précédée d'un préavis.

Notifié 5 jours francs (dimanche ou jour férié compris) avant le déclenchement de la grève à l'autorité hiérarchique, le préavis doit émaner d'une organisation syndicale représentative et donner toutes précisions utiles sur ses motifs, sa durée et ses modalités. Il doit être écrit et revêtu de la signature d'une personne ayant qualité pour engager l'organisation syndicale. Lorsqu'il sera déposé, un accusé de réception sera immédiatement délivré.

La loi du 19 octobre 1982 précise que pendant la durée du préavis, les parties intéressées sont tenues de négocier.

Une grève qui ne respecterait pas ces dispositions serait illicite et pourrait donner lieu à des poursuites disciplinaires.

- Limites de l'exercice du droit de grève

Dans son arrêt de principe du 7 juillet 1950 (DEBAENE), le Conseil d'Etat a souligné qu'il appartenait au gouvernement, responsable du bon fonctionnement des services publics, de fixer lui-même sous le contrôle du juge la nature et l'étendue des limitations qui doivent être apportées à ce droit.

Ces limites sont aujourd'hui de nature et de portée très diverses.
- Certaines catégories de personnel (Police) peuvent se voir totalement privées du droit de grève.

- Le chef de service peut toujours limiter la grève et imposer un service minimal pour des motifs de continuité du service ou de sécurité.

- En tout état de cause, c'est à l'autorité territoriale qu'il appartient d'apprécier si l'organisation des services susceptibles d'être concernés exige la présence d'un ou plusieurs agents et de prendre, le cas échéant, un arrêté de réquisition pour assurer le maintien en place de l'effectif indispensable.
Par contre, si des non grévistes peuvent assurer le travail minimum, l'autorité territoriale dépasserait les limites de ses prérogatives en requérant des grévistes (Conseil d'Etat, 9 juillet 1965).

Un agent peut engager une procédure en excès de pouvoir contre une décision relative au service minimum à assurer.
L'autorité territoriale peut interdire aux grévistes d'occuper les locaux des services, le droit de grève n'étant pas mis en cause par une telle décision.
Le Juge Administratif contrôle l'adéquation de la limitation au but invoqué.

- La grève tournante est interdite depuis la loi de 1963.

- La grève sur le tas, ou grève avec occupation des locaux, est illicite.

- La grève politique est également prohibée ; le juge contrôle que la grève en cause avait bien un motif politique et non un but de défense des intérêts professionnels des agents. Il faut reconnaître, à cet égard, que la distinction n'est pas toujours aisée.

- Enfin, arme ultime, le Gouvernement dispose, depuis la loi du 11 juillet 1938, du droit de réquisition des personnes dont la désobéissance est réprimée pénalement.

- Conséquences de l'exercice du droit de grève

Par application de l'article L. 521-6 du Code du travail et des article 13 et 33 du décret n° 1587 du 29 décembre 1962, l'absence de service fait entraîne la réduction de la rémunération.
Simple corollaire de l'absence de service, cette réduction ne constitue pas une sanction disciplinaire et n'est soumise à aucune forme.

La législation applicable aux fonctionnaires de l'Etat en matière de définition de service fait a été transposée aux agents des collectivités locales par la loi du 19 octobre 1982 qui précise, entre autres :

- L'absence de service fait, résultant d'une cessation concertée du travail donne lieu, pour chaque journée :

- lorsqu'elle n'excède pas 1 heure, à une retenue égale à 1/151,67 ème du traitement mensuel.

- lorsqu'elle dépasse 1 heure, sans excéder ½ journée, à une retenue égale à 1/60 ème du traitement mensuel.

- lorsqu'elle dépasse ½ journée sans excéder 1 journée, à une retenue égale à 1/30 ème du traitement mensuel.

- L'absence de service fait entraîne une retenue du traitement ou du salaire et de ses compléments autres que les suppléments pour charges de famille.